1. Des principes à « REVISITER » 

Vers un nouveau contrat social ?

La présidente du FMI, Kristalina Georgieva, a appelé, le 3 juin 2020, à définir collectivement une « grande réinitialisation » (« Great Reset »). Ce sera le thème d’un sommet qui aura lieu en janvier 2021, soutenu par le FMI et convoqué par le Forum Économique Mondial (de Davos). Doit-on considérer qu’il s’agit de refonder notre « pacte social » ? De fait, de toutes parts les appels à une révision des fondements théoriques et juridiques de l’action économique se multiplient.

C’est sans doute dès lors le moment de faire valoir l’utilité d’une vision fondée sur un « solidarisme rénové », c’est-à-dire sur l’idée que de fait le Contrat Social doit être refondé, que les fondements du capitalisme doivent être restaurés, et qu’ils peuvent l’être notamment à travers l’idée que les individus sont liés par des obligations mutuelles.

Les limites d’une période de dérégulation relative, mais aussi de destruction des solidarités effectives, paraissent en effet patentes (1).
Des dynamiques positives sont pourtant possibles, de nombreux exemples en témoignent (2).

1. LES LIMITES D’UN LONG CYCLE DE DEREGULATION ET D’INDIVIDUALISME METHODOLOGIQUE

Les effets d’un système qui considère l’homme comme un moyen et non comme une fin sont nécessairement désastreux, sur le long terme : il détériore forcément les liens civiques, aiguise les égoïsmes et s’accompagne d’une montée inexorable des inégalités. Il est inutile d’insister sur le succès des ouvrages de Thomas Piketty qui étudie la concentration des richesses entre les mains d’un nombre toujours relativement plus faible d’individus. D’autres travaux montrent que la montée des inégalités n’est pas simplement le résultat d’une captation de la valeur par des capitalistes, c’est-à-dire les propriétaires des moyens de production, mais d’une captation de cette valeur, à l’intérieur même du travail, par une classe de travailleurs, les gagnants de la méritocratie.

Même si ce type de constat est parfois pris pour de la naïveté, il faut redire ici que les inégalités entre les pays favorisent les guerres, les instabilités régionales et intra-pays. Parmi bien d’autres modes d’enchaînement, les plus pauvres sont souvent manipulés par les dirigeants qui exacerbent les différences culturelles, cultuelles pour masquer leurs propres déviances, turpitudes et avantages retirés du système mondial.

Ces inégalités favorisent également une immigration non voulue par le migrant lui-même. Personne ne risquerait sa vie au cours d’un dangereux périple s’il voyait dans son pays d’origine la possibilité d’évoluer favorablement. Cette immigration, non choisie ni par l’immigrant ni par le pays d’accueil est source de déstabilisation d’abord pour les pays d’origine mais aussi dans les pays destinataires. Ceux-ci ne sont pas préparés (et ne se préparent pas) à ces vagues migratoires. Cela provoque des chocs culturels (barrière de langue, habitudes culturelles...). Les inégalités favorisent les instabilités au sein de chaque pays. La délinquance est « boostée », une économie parallèle se développe. La pauvreté est le terreau de l’abstention politique, du rejet de tout ce qui représente les autorités. Les populistes de tout poil en profitent pour prospérer.
L’impact des inégalités est également économique. Les inégalités freinent la consommation et la croissance. Un rapport de l’OCDE de 2014 le souligne. Angel Curria, secrétaire général de l’OCDE l’a dit de manière synthétique : « les pays qui promeuvent une égalité des chances dès le départ sont ceux qui vont croitre et prospérer ». Selon ce rapport, en Italie, en Angleterre et aux USA, la croissance cumulée aurait été entre 6% et 9% supérieure si les inégalités ne s’étaient pas aggravées. Ainsi, même les riches Pays ou Individus ont intérêt à long terme à une réduction et ensuite une stabilité des inégalités.

Il apparaît ainsi évident que ce qu’on peut appeler un « contrat social », qu’on pourrait nommer aussi un « engagement pour la démocratie », est également un contrat pour une croissance économique et sociale équilibrée et harmonieuse.

2. DES EXEMPLES DE DYNAMIQUES POSITIVES, POUR UNE CROISSANCE EQUILIBREE ET PARTAGEE

Un des aspects du confinement lié à la Covid-19 a été l’utilisation des circuits courts pour les besoins élémentaires comme l’alimentation. L’entraide vécue avec les voisins.es, au service des personnes vulnérables, a aussi porté sur des petits travaux, réparations, manutentions, et des déplacements pour faire les achats que l’autre ne peut pas faire. Plus généralement, l’écologie apporte avec elle une nouvelle forme de croissance due à de nouvelles technologies et de nouvelles méthodes. Elle vise à donner le pouvoir de faire autrement à ceux qui savent regarder, écouter, réfléchir, analyser et bâtir.

Le travail à faire ne consiste donc pas à restaurer les fondements du capitalisme dans leur forme canonique, mais plutôt à développer une version plus démocratique d’un marché économique libre et régulé, pour que les éléments essentiels à la cohésion sociale républicaine soient maintenus et développés : éducation – santé – accès au logement – transport – accès au travail – retraite – dépendance – protection du cadre de vie (ce sont sans doute des « biens supérieurs », au sens de la théorie économique, ce sont en tout cas des biens désirables, au sens de l’équité sociale.

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